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De la MDMA pour soigner le stress post-traumatique ?

Loin des dancefloors, des chercheurs de laboratoires prestigieux explorent le potentiel thérapeutique de la drogue de l'amour




Le traumatisme, c’est quoi ? Rien à voir avec de l’ananas sur une pizza ou ton prof en vacances sur la même plage que toi. Non ! le traumatisme c’est pas aussi simple que ça et surtout c’est pas toujours ce qu’on croit. Les chercheurs se sont mis d’accord pour parler de stress post-traumatique. Le stress post-traumatique, c’est ton état quand tu as été victime ou témoin d’un événement qui t’a mis face à l’horreur, l’effroi voire la mort (accidents graves, agressions, harcèlement, guerre …). Ton humeur peut être changeante sans raison, la scène de l’événement peut réapparaitre sans prévenir (même quand tu dors) et tu peux te mettre à éviter les situations qui te font repenser à l’événement traumatisant. Tu peux t’en rendre compte par toi-même ou les autres te le font remarquer.


Bref, on n'est pas au top, et les symptômes peuvent parfois s’installer durablement, on parle alors de Trouble du stress Post Traumatique (TPST). Heureusement, il y a des solutions. Comme la thérapie psychédélique par exemple, une thérapie où les effets d'une substance psycho-active sont utilisés pour obtenir des effets thérapeutiques. La molécule de l’ecstasy, par exemple : la MDMA (pour méthyènedioxy-méthylamphétamine), est une option possible.


Pourquoi la MDMA ? La sérotonine, la dopamine et la noradrénaline sont des messagers de notre cerveau qui agissent sur l’humeur, le plaisir, le désir, l’empathie (capacité à se mettre à la place de l’autre) et la compassion. La MDMA agit dans le cerveau en modifiant les niveaux de disponibilités de ces différents messagers qu'on appelle les neuro-transmetteurs. La personne qui en consomme ressent des émotions décuplées, et ses capacité de concentration et de mémorisation sont altérées pendant que la molécule agit, ce qui peut durer plusieurs heures.



C’est nouveau comme thérapie ? En fait, les thérapies psychédéliques datent des années 50. Elles tentaient déjà de traiter les traumatismes mais aussi l’alcoolisme. L’idée était que l’expérience mystique provoquée par la drogue donc l’expérience psychédélique serait utile en thérapie. Le problème c’est que conseiller de prendre des dérivés de drogues ça passait pas vraiment dans la société de l’époque, alors on a stoppé les recherches. Il faudra attendre les années 80 pour qu’on s’intéresse de nouveau à la MDMA pour les personnes souffrant de stress post-traumatique. Depuis, les recherches ont repris ! Le docteur, Mithoefer et son équipe de chercheurs et psychiatres américains, en particulier, ont publié en 2018, dans la prestigieuse revue scientifique The Lancet Psychiatry, un article examinant la possibilité du recours à la MDMA pour la prise en charge du Trouble de Stress Post-Traumatique.

Comment vérifier l'efficacité de la MDMA ? Les chercheurs ont demandé à des vétérans, des policiers et des pompiers qui ont un TSPT de participer à leurs recherches. Ce sont des populations à risque car ils sont confrontés dans leurs métiers à des situations potentiellement traumatiques. Les volontaires ont passé des tests puis ils ont été répartis dans trois groupes au hasard. Ni les thérapeutes ni les patients ne savaient dans quels groupes ils étaient. Chaque groupe devait prendre une dose différente de MDMA : 30mg, 70mg ou 125mg. Pas de triche ! Mais la quantité de MDMA était cachée aux participants pour être certain que c’était bien la quantité qui faisait effet, et non les attentes et les croyances des participants sur les effets attendus. Pendant 3 mois, les chercheurs ont vu leurs patients toutes les semaines, une fois par semaine. Les participants recevaient une thérapie de soutien psychologique, et toutes les quatre séances, la séance se déroulait avec la prise d’une dose de MDMA (dépendante du groupe du participant). La séance de prise de MDMA se déroulait comme ça : le participant devait rester 8h avec les chercheurs pour qu’on surveille son comportement et les effets physiques et psychologiques. On continuait à les surveiller toute la nuit. C’est quand même plus rassurant ! Et ce cycle se répétait sur la durée de l’expérience : 3 mois. Après la prise de MDMA, chaque participant pouvait contacter les chercheurs à tout moment. S’il vivait un événement négatif ou s’il avait des sensations désagréables inhabituelles, il pouvait appeler directement les chercheurs. Un an après la fin de l’expérience, les chercheurs ont revu les participants pour savoir si oui ou non, la MDMA avait eu des effets sur eux.


Et alors que s'est-il passé ? Ça leur a fait de l’effet ! Peu importe le groupe, tous les participants dormaient mieux, avaient de meilleures relations et moins de symptômes de TSPT. Mais ceux qui avaient reçu des doses actives de MDMA présentaient des réductions nettement plus importantes que les autres participants, et ce un an après !


Ceux qui avaient reçu des doses actives de MDAM présentaient des réductions de symptômes nettements plus importantes que les autres participants, et ce un an après la recherche !

En bref, tes peurs et ton anxiété, quand tu te rappelles cet événement traumatisant, sont moins présents. Du coup, ça pourrait être plus rapide d’aller mieux après un TSPT. Et tout ça avec une seule prise par mois ! D’ailleurs, il semblerait qu’au-delà de ses effets sur le traumatisme, cette thérapie psychédélique permettrait un véritable épanouissement psychologique… Incroyable non ? Alors un composé tiré de l’ecstasy, c’est pas dangereux ? Pendant l’expérience, les participants étaient très surveillés. On prend pas de la MDMA seul(e) et n’importe comment ! Les effets indésirables étaient moyennement intenses et disparaissaient au cours de la semaine. Il faut quand même dire qu’à la suite des séances de prise de MDMA, 20 patients sur 24 ont fait des insomnies et ont ressenti de la fatigue, de l'anxiété qui disparaissent après maximum 7 jours. Ils se sont aussi plaints de maux de tête et de tensions musculaires qui disparaissent le lendemain. Parmi les 4 autres, malheureusement, 1 participant a tenté de mettre fin à ses jours après la 2ème séance MDMA. Il faisait partie du groupe qui prenait 30 mg par mois et avait déjà tenté de se suicider par le passé, et il a été jugé que la tentative n'était pas liée à la prise, si bien qu'il a continué l'étude. Aucun autre participant n'a eu besoin d'intervention médicale.


La thérapie MDMA, dans mon cas c'est possible ? C’est pas genre, tu prends de la drogue et hop t’es guéri de ton traumatisme ! Ça prend du temps et on fait pas ça n’importe comment et avec n’importe qui. La prise de MDMA n'est pas sans risque, même avec la plus petite dose prévue. Dans cette recherche, les chercheurs voulaient surtout vérifier que la prise n’était pas dangereuse et pouvait avoir des effets positifs. Pour mieux connaître l’efficacité de cette nouvelle approche en thérapie, il faut attendre les résultats de la phase suivante. Les recherches sont en cours … Dans tous les cas, la MDMA sera donnée par le thérapeute et uniquement avec lui ! « Ecstase » prévue pour 2021… en attendant que cette approche soit autorisée en France, ce qui est loin d'être le cas ! 😉 Pour en savoir plus sur la phase 1 de la recherche : Mithoefer, M.C., et al. (2010). The safety and efficacy of ±3,4-methylenedioxymethamphetamine-assisted psychotherapy in subjects with chronic, treatment-resistant posttraumatic stress disorder: the first randomized controlled pilot study. Journal of Psychopharmacology, 25(4), 439-452. Pour en savoir plus sur la phase 2 de la recherche : Mithoefer, M.C., et al. (2017). 3,4-methylenedioxymethamphetamine (MDMA)-assisted psychotherapy for post-traumatic stress disorder in military veterans, firefighters, and police officers: a randomised, double-blind, dose-response, phase 2 clinical trial. The Lancet Journal, 5(6), 486-497. Pour en savoir plus sur la MDMA dans l’alcoolisme : Sessa, B. (2017). Why MDMA therapy for alcohol use disorder? And why now? Neuropharmacology, xxx, 1-6.



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